Depuis quelques années, les modes amiables de règlement des litiges sont encouragés par le législateur.
Ainsi, l’article 56 du Code de procédure civile cristallise cette orientation, en exigeant désormais que :
« Sauf justification d’un motif légitime tenant à l’urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu’elle intéresse l’ordre public, l’assignation précise également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige. »
Les démarches amiables peuvent tenir à des échanges préalables de correspondances entre les parties pour faciliter un compromis. Il peut s’agir encore du recours à une mesure de conciliation ou de médiation. Il peut également s’agir de la mise en œuvre d’une démarche collaborative.
En l’absence de tentative de règlement amiable, il n’existe pas de sanction à l’exigence de l’article 56 du Code de procédure civile. Ainsi, la demande en justice ne sera pas déclarée irrecevable de ce fait.
Simplement, s’il n’est pas justifié lors de l’introduction de l’instance de diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige, le juge pourra proposer aux parties une mesure de conciliation ou de médiation.
Si l’article 56 du Code de procédure civile n’emporte pas de sanction, il sera observé qu’il existe du fait de règles spécifiques ou de clauses contractuelles particulières, des situations dans lesquelles l’irrecevabilité d’une demande en justice pourra être relevée en l’absence de justification de diligences amiables préalables.
Tel est le cas notamment en matière de litige contre un architecte ou entre architectes.
Premièrement, le contrat d’architecte peut stipuler une clause de saisine préalable obligatoire de l’ordre des architectes.
En effet, le contrat-type du conseil national de l’ordre des architectes propose une clause en ce sens.
La clause en question ne constitue pas une simple proposition de saisine, mais une véritable obligation préalable que le maitre d’ouvrage devra veiller à respecter avant d’introduire sa demande en justice.
Il s’agira alors pour lui de justifier de la saisine préalable de l’ordre pour que sa demande en justice contre l’architecte puisse être considérée comme recevable.
Néanmoins, il sera relevé que cette obligation de saisine préalable n’a pas vocation à s’appliquer lorsque la responsabilité de l’architecte est recherchée non pas au titre d’une inexécution contractuelle mais au titre de la mise en œuvre de la garantie décennale (Cass.3ème civ. 23 mai 2007, n° de pourvoi 06-15668).
La solution est cohérente puisqu’en la matière, il y a présomption de responsabilité de l’architecte, d’une part, et qu’il peut y avoir intérêt à introduire l’action en justice pour préserver le délai de ladite garantie, d’autre part.
Il a aussi été jugé que la clause instituant une saisine préalable du conseil régional de l’ordre des architectes n’est pas applicable à la demande en justice tendant à la désignation d’un expert judiciaire au visa de l’article 145 du Code de procédure civile, dès lors que cette action n’a qu’une vocation probatoire et non de trancher sur les responsabilités. (Cass. 3ème Civ. 28 avril 2011, n° de pourvoi10-30721).
Deuxièmement, il sera aussi signalé la situation particulière du litige entre architectes.
Dans un récent arrêt rendu le 29 mars 2017 (n° de pourvoi 16-16585), la première chambre civile de la Cour de cassation rappelle qu’en application des dispositions de l’article 25 du décret n° 80-217 du 20 mars 1980 portant Code des devoirs professionnels des architectes, tout litige qui porte sur l’exercice par les architectes de leur profession est subordonné à la saisine préalable du conseil régional de l’ordre des architectes.
Dans cette affaire, un premier architecte exposait avoir été évincé par un autre dans le cadre d’une mission de maitrise d’œuvre confiée à un groupement d’entreprises et sollicitait la réparation de ses préjudices en résultant.
Les juges du fond ont déclaré sa demande indemnitaire irrecevable faute pour lui d’avoir opéré saisine préalable du conseil régional de l’ordre des architectes aux fins de conciliation.
En définitive, il est primordial – avant de saisir une juridiction – de s’assurer de l’absence de mécanisme obligatoire institué par la loi ou le contrat visant à imposer un mode impératif de règlement préalable d’un différend.